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8 avril 2025
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Drone abattu, ciel fermé : l’escalade s’intensifie entre Alger et Bamako

Une nouvelle ère de tensions s’installe entre l’Algérie et les États du Sahel, après l’épisode explosif de la destruction d’un drone malien par les forces armées algériennes. L’Algérie rajoute à la provocation : elle annonce, à compter de ce lundi, la fermeture totale de son espace aérien à tous les vols civils et militaires en provenance ou à destination du Mali, invoquant des « incursions répétées et inacceptables » de l’appareil militaire malien sur son territoire.
Dans un communiqué publié dans la matinée, le ministère algérien des Affaires étrangères justifie cette décision par la nécessité de « protéger la souveraineté de l’espace aérien national, face à des actes provocateurs et contraires aux usages diplomatiques ». L’Algérie affirme en effet que le drone malien abattu dans la nuit du 31 mars au 1er avril se trouvait « bien à l’intérieur de la frontière algérienne », ce que les autorités de Bamako réfutent catégoriquement.
En parallèle, Alger a rappelé pour consultation ses ambassadeurs accrédités au Mali, au Niger et au Burkina Faso, signant un tournant radical dans ses relations avec les pays de l’Alliance des États du Sahel (AES). Ce geste diplomatique fort intervient alors que Bamako, Niamey et Ouagadougou accusent l’Algérie de soutenir indirectement les mouvements armés opérant dans la région frontalière.
Fait notable : la riposte n’a pas tardé. Les trois capitales sahéliennes, agissant de concert, ont annoncé dans la foulée le rappel immédiat de leurs ambassadeurs accrédités à Alger. L’AES, à travers une déclaration commune, dénonce un « acte d’hostilité caractérisé » de la part de l’Algérie et condamne « une manœuvre d’isolement diplomatique inadmissible à l’encontre de peuples en lutte contre le terrorisme transfrontalier ».
Une escalade aux allures de rupture
Cette crise trouve son origine dans la chute, le 1er avril, d’un drone de l’armée malienne dans la région de Tinzaouatène, à proximité de la frontière algérienne. Tandis qu’Alger affirme qu’un drone malien a violé son espace aérien, Bamako affirme disposer de preuves formelles que l’appareil n’a jamais quitté le territoire malien. Dans un communiqué officiel n°073, le Gouvernement de la Transition au Mali accuse frontalement l’Algérie :
« Le régime algérien, en plus de servir de base arrière aux groupes terroristes, s’engage aujourd’hui dans la lutte armée pour perpétrer des agressions contre un État voisin, en vue de protéger ses supposés terroristes. »
Le ton est sans appel, et cette prise de position fait écho à une série d’accusations similaires portées ces derniers mois par les pays de l’AES, qui soupçonnent l’Algérie de jouer un double jeu dans la crise sécuritaire sahélienne. L’hostilité d’Alger serait, selon eux, motivée par un agenda géopolitique dépassé, dans lequel l’Algérie tente désespérément de maintenir un rôle de puissance tutélaire au Sahel – un rôle que lui contestent désormais ouvertement ses voisins.
Pour de nombreux observateurs, la fermeture unilatérale de l’espace aérien marque non seulement une escalade militaire et diplomatique, mais aussi un signal : Alger veut reprendre l’initiative dans une région où elle a perdu de son influence. Depuis l’émergence de l’AES, l’Algérie a vu son rôle traditionnel de médiateur dans les crises sahéliennes marginalisé. Les critiques récurrentes sur son inaction face aux groupes armés dans le sud algérien, et les échecs répétés de l’Accord d’Alger, ont achevé de discréditer sa posture régionale.
À présent, en fermant son ciel et en rappelant ses diplomates, Alger semble parier sur une stratégie de confrontation directe. Mais cette posture pourrait se retourner contre elle. Car dans le même temps, le Mali, le Niger et le Burkina Faso renforcent leur solidarité, dénonçant une politique « belliqueuse, paternaliste et anachronique » de la part du régime algérien.
Cette montée en tension survient dans un contexte international tendu, où la lutte contre le terrorisme sahélien nécessite une coopération renforcée entre États riverains. Or, le retrait de l’Algérie de cette coopération – voire son obstruction active, selon les mots de Bamako – pourrait placer Alger dans une position d’isolement régional inédite.
À Bamako, le ton se veut ferme mais déterminé : « Le Mali poursuivra ses opérations de sécurisation de son territoire, quelles que soient les menaces ou les obstacles. » Et à Niamey comme à Ouagadougou, les discours soulignent une volonté commune de s’affranchir des anciennes tutelles, qu’elles soient occidentales ou régionales.

Maroc diplomatique

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