En l’espace d’un mois, trois ministres sénégalais ont effectué des missions de benchmark au Maroc relatives aux secteurs des mines, des transports et du développement durable. Objectif: s’inspirer du modèle marocain dans la réalisation des grands projets figurant dans l’agenda du gouvernement de Dakar. Décryptage.
Le gouvernement sénégalais veut s’inspirer du Maroc dans la conduite et la réalisation de ses grands projets. En l’espace d’un mois, trois ministres se sont déplacés dans le Royaume pour des missions de benchmark, afin de s’enquérir de l’expérience marocaine dans différents secteurs stratégiques.
Le défilé ministériel a débuté le jeudi 29 août dernier, avec la visite du ministre sénégalais des Infrastructures et des Transports terrestres et aériens, Malick Ndiaye, accompagné du directeur général de la Société nationale de gestion du patrimoine du Train express régional du Sénégal (SENTER), Cheikh Ibrahima Ndiaye, et celui des Chemins de fer du Sénégal (CFS), Ibrahima Ba.
Lors de sa rencontre avec le ministre du Transport et de la Logistique, Mohammed Abdeljalil, la délégation sénégalaise a procédé à la signature de deux conventions-cadres de coopération entre la SENTER d’une part, et l’Office national des chemins de fer (ONCF) et l’Institut de formation ferroviaire (IFF). Les deux ministres ont prévu de constituer une équipe de travail pluridisciplinaire pour l’élaboration d’un plan d’action visant à mettre en œuvre les conventions signées.
«Nous avons exprimé notre volonté de travailler ensemble pour renforcer la coopération bilatérale, notamment dans les domaines de l’exploitation et de la maintenance ferroviaire, du transport routier et aérien», a indiqué Malick Ndiaye, dans une publication sur X, soulignant que le Sénégal, «qui prépare une nouvelle politique ferroviaire pour améliorer la mobilité urbaine et interurbaine, accorde un grand intérêt à l’expérience marocaine dans le domaine du transport ferroviaire».
Et pour cause, sous la houlette du nouveau président Bassirou Diomaye Faye, le Sénégal planifie nombre de grands projets dans le secteur des transports, dont la mise en place d’un réseau de chemin de fer maillant l’ensemble du territoire national, à travers la construction d’une gare ferroviaire dans chaque pôle économique du pays.
Marcher dans les pas du groupe OCP
À cela s’ajoutent la construction de ports régionaux, la création d’aéropôles abritant des complexes industriels dédiés à la maintenance et à la formation aéronautique autour des aéroports de Blaise Diagne de Diass (AIBD), de Saint-Louis et de Ziguinchor, ainsi qu’un réseau de transport multimodal intégrant le réseau routier, ferroviaire, maritime et aéroportuaire.
Après les transports, place aux mines. Début septembre, une délégation conduite par le ministre sénégalais de l’Industrie et du Commerce, Serigne Gueye Diop, s’est rendue à la mine de Khourigba, à l’Université Mohammed VI polytechnique (UM6P) et à la plateforme industrielle de Jorf Lasfar. Objectif: étudier l’écosystème du groupe OCP pour mieux valoriser les réserves de phosphate de son pays.
«Le Sénégal veut s’inspirer du modèle marocain, à travers le groupe OCP, en privilégiant la transformation locale de cette ressource et l’exploitation des produits dérivés tels que l’uranium. Nous sommes assis sur une mine d’or inexploitée», a affirmé le ministre dans une déclaration à la télévision nationale sénégalaise RTS1, en marge de cette visite.
Un programme de collaboration avec le groupe OCP a été acté lors de cette visite, pour étudier le potentiel phosphatier de la région de Matam (nord-est du Sénégal), afin d’y établir une zone industrielle et des unités de production d’engrais, ainsi que des centres de production d’engrais pour satisfaire les besoins nationaux et réduire les importations de cet intrant d’ici 2026.
Partenariat dans des projets de développement durable
La transition verte occupe également une place importante dans l’agenda du gouvernement sénégalais. En atteste le mémorandum d’entente signé le 23 septembre dernier entre Leila Benali, ministre de la Transition énergétique et du Développement durable, et son homologue sénégalais Daouda Ngom, lors de sa visite de travail dans le Royaume.
Cette convention porte essentiellement sur l’échange d’expériences et de savoirs, l’assistance technique ainsi que le développement de projets conjoints dans le domaine du développement durable. Les deux ministères mettront en place un plan d’action conjoint pour réaliser «tous les points de l’accord», selon le ministre sénégalais.
Une meilleure gestion des déchets fait aussi partie des priorités du gouvernement sénégalais, qui prévoit de créer un centre d’enfouissement moderne sur le site de Mbeubeuss (la plus grande décharge du pays), situé à 20 kilomètres de Dakar. Cette infrastructure sera couplée à une unité de production d’électricité, composée de générateurs par turbine à gaz.
Des domaines dans lesquels les deux pays pourraient collaborer, tout comme dans la production des énergies renouvelables, secteur dans lequel le Sénégal nourrit de grandes ambitions. D’ailleurs, durant son séjour, la délégation sénégalaise a visité le site de la station de réutilisation des eaux usées «REUSE» à Salé et le parc éolien de Koudia El Beida dans la région de Tanger.
Ces différentes missions ministérielles se sont déroulées quelques semaines après la visite effectuée au Maroc en juillet dernier par le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), Fadilou Keita, sur invitation du directeur général de la Caisse des dépôts et de gestion (CDG), Khalid Safir.
Dans un communiqué posté sur X, la CDC indique que son directeur général «souhaite s’inspirer du modèle marocain afin d’adapter l’organisation, le fonctionnement et les modalités d’intervention de la CDC aux orientations des plus hautes autorités du pays», et annonce la signature prochaine d’une convention de coopération qui «vise à faciliter le partage d’expérience et la coopération entre les branches, filiales et entités des deux institutions».
Une relation bilatérale solide et constante
Ces partenariats économiques ne font que confirmer et renforcer les relations séculaires maroco-sénégalaises qui résistent à l’épreuve du temps, indépendamment des régimes politiques en place. La visite officielle de la ministre des Affaires étrangères et de l’Intégration africaine, Yassine Fall, les 26 et 27 mai derniers à Rabat, son premier déplacement à l’étranger après sa nomination en avril 2024.
Durant cette visite, la cheffe de la diplomatie sénégalaise a réaffirmé le soutien «constant et ferme» du Sénégal à l’intégrité territoriale et à la souveraineté du Maroc sur l’ensemble de son territoire, y compris le Sahara, ainsi qu’au plan d’autonomie présenté par Rabat pour résoudre ce différend.
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