Alors que l’Ukraine et la Russie ont signé deux accords pour libérer les cargaisons de céréales afin d’atténuer la crise alimentaire mondiale en particulier vécue en Afrique, d’autres problèmes viennent peser lourd dans la balance des cours des denrées alimentaires de première nécessité. Il s’agit des risques d’inondations, de sécheresse et des vagues de chaleur, tous conséquence du changement climatique, et qui diminuent la production et augmentent les prix.
Si les deux accords signés sous l’égide de l’ONU et de la Turquie entre Kiev et Moscou ont été une bouffée d’air pour plusieurs pays africains dépendants des importations de céréales, ces derniers ne sont toutefois pas au bout de leurs peines.
Malgré la tournée du chef de la diplomatie russe, Sergei Lavrov, en Afrique pour rassurer ses partenaires de la fiabilité de la Russie (qui empêchait les cargaisons de mais et de blé de quitter les ports ukrainiens), les dirigeants africains ont accueilli la nouvelle de la reprise graduelle des exportations de céréales avec soulagement mais surtout avec beaucoup de prudence.
Parmi les raisons de cette distance, figure le constat amer que le continent reste ultra dépendant des importations pour nourrir sa population. Si le blé russe et ukrainien couvrent 30% des besoins mondiaux, certains pays du continent comme l’Egypte importent jusqu’à 85% de leurs céréales.
De plus, les rapports et déclarations des représentants de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) sont tous des signaux d’alarme criant au risque de famine dans plusieurs pays d’Afrique à cause de la hausse des prix des cours de céréales.
Dans les pays les plus dépendants des importations, la facture a augmenté de façon irrationnelle, allant jusqu’à 70% de plus pour les prix du riz et de la farine.
Les menaces de sécheresse, d’inondations et de vagues de chaleur vont être un autre facteur déterminant dans la poursuite de l’augmentation des prix, cela en dépit de la baisse enregistrée en juillet, qui a enregistré les prix les plus bas depuis janvier.
Les principaux producteurs mondiaux, à savoir les Etats-Unis, le Brésil et l’Argentine, font face actuellement à des vagues de chaleur qui impactent directement leur rendement à la baisse et une production moins importante signifie une augmentation des prix.
Les chiffres sont là, la production mondiale de maïs et de soja n’a pas atteint ses objectifs pour la campagne 2021-2022 qui visait quelque 45 millions de tonnes. En juillet, si les prix du maïs ont baissé de 18,9 % de moins qu’en juin, ils restaient cependant 11,3% plus élevés que ceux enregistrés en décembre 2021 et plus de 10% pour le soja.
Selon l’agence américaine Bloomberg, le département américain de l’Agriculture devrait revoir à la baisse ses perspectives de rendements de maïs et de soja cette semaine. Au sein de l’Union européenne, les vagues de chaleur impacteront les rendements en céréales de 5% par rapport à l’année précédente.
Le Maroc concerné
Le Maroc n’est pas en reste, puisque le Royaume vit une période de sécheresse jamais vue ces 30 dernières années. Elle est pire que les graves sécheresses des années 80 et 90. Des mesures ont été prises par les autorités en limitant la consommation d’eau potable et en renforçant la politique d’usines de dessalement de l’eau, mais c’est l’agriculture, l’une des principale ressources du pays, qui consomme le plus d’eau potable.
Et pourtant, à cause de la sécheresse, les autorités ont annoncé très tôt cette année que la récolte céréalière allait être en dessous des espérance, allant jusqu’à moins 67 % de rendement atteignant seulement 3,4 millions de tonnes cette année, contrairement à l’année précédente où les recettes exceptionnelles de l’agriculture ont augmenté les revenus du pays.
Certains pays en Afrique souffrent davantage de la situation de sécheresse et l’instabilité géopolitique. Des Etats comme le Kenya, l’Éthiopie, la Somalie, et Djibouti connaissent également la pire sécheresse depuis 40 ans.
Dans un communiqué, le directeur des urgences de l’International Rescue Committee pour l’Afrique de l’Est, Shashwat Saraf, a indiqué que la levée du blocus sur les céréales ukrainiennes et russes, « contribuera dans une certaine mesure à atténuer la faim extrême à laquelle sont confrontées plus de 18 millions de personnes en Afrique de l’Est » soulignant que déjà 3 millions de personnes sont déjà confrontées à des conditions de faim catastrophiques ».
« La prochaine étape importante doit consister à financer intégralement la réponse humanitaire dans la région, afin d’éviter les pires effets de la sécheresse et d’empêcher qu’une famine catastrophique sans précédent n’engloutisse complètement la région d’ici à la fin de l’été », a-t-il ajouté.
Selon la FAO, d’ici la fin de l’été « 40 millions d’Africains seront en insécurité alimentaire accrue », si des solutions en urgence ne sont pas prises.
hespress